Broderie Tapisserie de Bayeux - Musées et Patrimoine - Première partie
Les sources d'inspiration de la broderie
Cette broderie inspirée par la Tapisserie de Bayeux est le deuxième ouvrage de notre collection Musées et Patrimoine. J’ai choisi ce thème pour diverses raisons, l’aspect spectaculaire et unique de cette toile brodée de près de 70 mètres de long n’étant pas le moindre. La Tapisserie de Bayeux, ce sont aussi de lointains souvenirs d’enfance, quel écolier n’en a pas vu au moins une ou deux reproductions dans ses livres d’histoire et ce des deux côtés de la Manche ? En effet, la Tapisserie de Bayeux est au moins aussi connue en France qu’en Grande-Bretagne, puisqu’elle raconte une histoire commune à nos deux pays.
Depuis les débuts de Sajou, ma principale collaboratrice est anglaise, j’ai donc voulu aussi par ce moyen rendre un hommage à ces patries que l’une et l’autre aimons tant. Dans le même esprit que le premier ouvrage de la collection, La Manufacture de toiles de Jouy Oberkampf à Jouy-en-Josas, cette broderie ne se veut en aucun cas être une reproduction de la tapisserie d’origine.
Tout en respectant l’histoire et la philosophie de cette dernière, l’ouvrage proposé ici est une vision personnelle avec ce que cela entraîne de choix subjectifs. Mon but, outre le plaisir que vous pourrez trouver à broder un pan d’histoire médiévale, est aussi de vous faire découvrir cette œuvre insuffisamment connue qui a été classée au Patrimoine mondial de l’Unesco en 2007.
Bayeux, broderie ou tapisserie ?
Le titre de la broderie
En fait, le terme de tapisserie est impropre, puisque c’est bien une broderie dont il s’agit. Cette erreur de dénomination est-elle le fait de membres de la gent masculine qui, n’y entendant pas grand-chose à l’univers des ouvrages de dames, auraient ainsi successivement nommé ce chef-d’œuvre ? Quoiqu’il en soit, j’ai choisi le titre de « Broderie de Bayeux » pour cet ouvrage, ne pouvant, en tant que brodeuse, me satisfaire d’un intitulé erroné.
L’original est brodé sur du lin assez finement tissé d’une couleur oscillant entre le bis/beige et le gris patiné par près de 1 000 ans d’existence. À la suite de plusieurs essais, j’ai finalement opté pour un lin couleur sable qui m’a semblé être le meilleur compromis entre respect de l’histoire et rendu satisfaisant avec les coloris de laine utilisés. Les points employés sur la Tapisserie de Bayeux sont du point de tige pour les lignes, les contours et les lettres, et un mélange de point lancé et de point de couchure pour les parties pleines. Souhaitant être accessible au plus grand nombre, c’est au point de croix que cet ouvrage a été interprété, le point arrière et le demi-point étant largement utilisés pour figurer ce qui, sur l’original, est au point de tige.
J'ai composé le titre à la manière des lettres, un brin maladroites, qui se trouvent sur la broderie originale. La broderie de Bayeux telle que nous la connaissons aujourd’hui mesure près de 64 mètres de long, mais nous savons que la fin a été abîmée et est incomplète. Sa hauteur oscille entre 45 et près de 54 cm. Elle fut brodée en huit pièces différentes. Ce n’est qu’au XVIIIe siècle que l’ensemble fut cousu sur une autre toile de lin plus large et que furent numérotées les scènes. Repères infiniment pratiques lors de la visite.
Les couleurs de la tapisserie de Bayeux
Les coloris de la broderie au point de croix
Lorsqu’elle fut nettoyée puis installée, en 1983, dans sa configuration actuelle, les conservateurs ont été étonnés par le peu de différence entre les couleurs au revers de la broderie et celles de la face visible. Ces couleurs sont au nombre de sept : un rouge brique, un vert-bleu, un vieil or, un vert olive, un bleu, un bleu très sombre qui est d’ailleurs peut-être un noir, et un vert cendré. J’ai tâché d’être au plus près de ces coloris avec la Laine Saint-Pierre. Le vert cendré (n° 814) étant représenté sur la grille par du gris, afin d’éviter toute confusion avec le vert olive (n° 845). Tout comme le bleu (n° 930), qui est clair sur la grille, pour ne pas être confondu avec le bleu sombre/noir (n° 648). Si vous allez voir la broderie de Bayeux, vous pourrez constater que, dans son dernier quart, des couleurs sont plus vives. Elles sont le fait de restaurations quelque peu malheureuses exécutées au XIXe siècle. Il faut noter que les couleurs n’ont pas de fonction naturaliste, un cheval peut être rouge, bleu ou vert, les flots, largement représentés, sont aussi de toutes les couleurs. En revanche, les reliefs sont merveilleusement rendus, jambes et sabots des chevaux contrastant avec le reste du corps, ou encore les rayures sur les navires, les esnèques, faisant ressortir ce type de construction aux planches assemblées bord sur bord.
Où a été brodée la Tapisserie de Bayeux ?
La carte de tous les évènements de la tapisserie de Bayeux
Si bien des mystères demeurent sur la Tapisserie de Bayeux, on estime cependant qu’elle dût être exécutée peu de temps après la conquête de l’Angleterre par Guillaume de Normandie en 1066. Les historiens semblent s’accorder sur le fait qu’elle fut réalisée dans le sud de l’Angleterre, probablement dans le comté de Kent, dans un atelier dépendant d’une des églises de Cantorbéry. Selon toute vraisemblance, elle fut commandée et payée par Odon de Conteville, évêque de Bayeux et demi-frère de Guillaume le Conquérant, qui, à cette époque, fut aussi comte de Kent. D’autres hypothèses évoquent la possibilité d’une réalisation dans la région de Winchester, un des hauts lieux de la Cour anglaise. L’énigme n’est pas résolue à ce jour et le peu de moyens de comparaison, la Tapisserie de Bayeux étant unique en son genre, laisse à penser qu’elle ne le sera probablement jamais.